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EUGENE BOUDIN. LE PERE DE L’IMPRESSIONNISME

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expositions

Le musée Marmottan Monet nous convie à prendre l’air dans les pas du peintre honfleurais Eugène Boudin. Précurseur de l’impressionnisme, mentor du jeune Claude Monet, Boudin développa un art fait sur le motif avec comme témoins la mer et surtout le ciel de la côte normande dont il fit l’acmé de son travail. On lui doit aussi quelques incursions dans les terres à la rencontre des vergers et des pâturages. Un artiste touchant à l’art des plus naturalistes.

Exposition Eugène Boudin. Le père de l’impressionnisme au musée Marmottan/Monet jusqu’au 31 août 2025

La Plage à Trouville, 1863 © Collection Yann Guyonvarc’h / Studio Christian Baraja SLB

Publico nunc igitur hostibus quodam

« Je l’ai dit et je le répète : je dois tout à Boudin. ». Celui qui parlait ainsi n’est autre que l’immense Monet, rendant hommage à ce père spirituel qui joua un rôle majeur dans son émancipation artistique, en l’entraînant sur le motif. Eugène Boudin (1824 – 1898), est resté un peu dans l’ombre de l’impressionnisme dont il fut pourtant l’artisan. Son art est au centre d’un magnifique accrochage de près d’une centaine d’œuvres issues de la collection d’un certain Yann Guyonvarc’h qui fit de sa passion du honfleurais le thème majeur de sa collection, forte de 300 œuvres. Quelques œuvres de Monet, entre autres, complètent la présentation.

Marché en Bretagne, 1870 © Collection Yann Guyonvarc’h / Ph.: D.R.

Venise, navire à quai, canal de la Giudecca, 1895 © Collection Yann Guyonvarc’h / Studio Ch. Baraja SLB

Ce serait un peu réducteur que de ne reconnaître qu’à Boudin le mérite d’avoir été « le père de l’impressionnisme », d’autant qu’en regardant l’évolution de la peinture, on constate que, peu à peu, les artistes s’y acheminaient depuis que les anglais Turner et Constable, pour ne citer qu’eux, avaient d’évidence des picotements dans leur pinceau et délaissaient, quelque peu, la peinture de leur temps.
Marin puis papetier
Concernant la formation de l’œil du jeune Boudin, il faut regarder du côté des « barbizonniens », les Troyon, Corot, Isabeau et autre Millet – ce dernier sera le premier « correcteur » des essais de Boudin – qui, de passage au Havre, se fournissaient dans la boutique de papetier-encadreur que Boudin avait ouvert en 1844 avec un associé. Avant, il avait bourlingué, au sens premier du terme, sur les pas de son père, marin à bord de bateaux assurant des liaisons inter-ports. Puis, on le retrouve comme mousse sur un vapeur assurant la liaison Le Havre – Honfleur. Délaissant la mer, son père le place chez un imprimeur puis dans la boutique d’un papetier-encadreur. Ce dernier emploi lui donnera l’idée de fonder sa propre entreprise.

La Plage à Trouville, 1893 © Collection Yann Guyonvarc’h / Studio Christian Baraja SLB

Là, il y rencontrera et exposera les œuvres des peintres de passage, œuvres qui éveillèrent et formèrent le premier regard du jeune rapin. Il commence à dessiner et, encouragé, il plaque assez vite papeterie et cadres pour suivre des cours à l’école municipale du Havre. Un enseignement qui le décide de se lancer dans une carrière artistique.

La côte normande, toujours

Grâce à quelques appuis et une exposition appréciée à la Société locale des Amis des Arts, il décroche une bourse de la municipalité du Havre. Cette bourse, forte de 1200 francs par mois, est assez pour tenter l’aventure à Paris. Il quitte le Havre en 1850 pour parfaire sa formation à Paris. Il vient se frotter à l’art des anciens au Louvre et intègre l’atelier du peintre Isabey. Là, il ahane à copier les anciens, une pratique courante et formatrice. Ses copies font mouche et, dès 1855, il développe assez vite un noyau d’amateurs. Ses origines reviennent sous son pinceau et il commence à brosser ses premières vues maritimes et autres scènes campagnardes avec chaumières et troupeaux. Ses bords de mer, il les trouve sur la côte normande, Trouville et Deauville entre autres. Clairvoyant, il écrit* « Quand on vient de passer un mois au milieu de ces races vouées au rude labeur des champs, au pain noir et à l’eau, et qu’on retrouve cette bande de parasites dorés qui ont l’air si triomphants, ça vous fait un peu pitié et l’on éprouve une certaine honte à peindre la paresse désœuvrée ».

Étretat, la falaise d’Aval au soleil couchant, 1890 © Collection Yann Guyonvarc’h / Studio Christian Baraja SLB

Marine. Les lamaneurs, dit aussi Pleine mer, les lamaneurs, 1887 © Collection de Yann Guyonvarc’h / Studio Christian Baraja SLB

La nature qu’il peint sur les bords de mer tend à gommer ces « parasites » réduits souvent à quelques silhouettes dont la petitesse n’a d’égal que la grandeur du ciel et de la mer. Le plein air devient son credo et le leitmotiv premier des impressionnistes à venir. « Trois coups de pinceau d’après nature valent mieux que deux jours de travail au chevalet. » notait-il dans un de ses carnets, quitte à terminer dans son atelier la toile commencée dans la nature. Il fut de ceux – avec Jongkind, Daubigny et Courbet – à céder aux sirènes d’un renoncement au classicisme enseigné alors dans les académies à une époque où le romantisme et le néoclassicisme d’un Ingres tenaient le haut du pavé. Boudin, en tête, prêche pour peinture spontanée, l’un des préceptes de cette nouvelle manière, radicale pour l’époque.

Le ciel, un inépuisable exercice de style

Cette côte normande et son ciel changeant remplissent tous ses vœux, « des rivages, voyons mon cher, quand on a sous la main la grève de Villers, celle de Villerville, il faut être fou pour courir si loin dans le désert. » écrit-il à son ami le peintre Louis Braquaval en juillet 1894. Il va développer sa manière qui enchante tant, privilégiant le ciel en un inépuisable exercice de style et, avec une rare maîtrise du temps : soleil perçant, coucher ou lever de l’astre, gros grain ou ciel bleu serein, mais surtout nuages et temps gris qui lui permettent un extraordinaire travail sur l’ouaté des nimbus et autres cirrus ou cumulonimbus. Il joue de la lumière comme plus tard, Monet s’y frottera en observant la cathédrale de Rouen. Le ciel envahissant, toujours, comme si le paysage et l’humanité, qui occupent souvent le tiers inférieur de ses compositions, n’était que le prétexte à situer ses œuvres.
Baudelaire écrit en 1859** : La légende cachée avec la main, vous devineriez la saison, l’heure et le vent… Tous ces nuages aux formes fantastiques et lumineuses, ces ténèbres chaotiques, ces immensités vertes et roses suspendues et ajoutées les unes aux autres, ces fournaises béantes, ces firmaments de satin noir ou violet, fripé, roulé ou déchiré… Ces études si rapidement et si fidèlement croquées d’après ce qu’il y a de plus inconstant, de plus insaisissable dans sa forme et dans sa couleur, d’après des vagues et des nuages… » Emboîtant, la même année, le pas à Baudelaire, Courbet déclare*** : « Nom de Dieu, vous êtes un séraphin ! Il n’y a que vous qui connaissiez le ciel ! ». Il scinde son année en deux périodes : aux beaux jours, il plante son chevalet dans sa Normandie natale et fait des séjours en Bretagne, puis sa condition financière lui permettra d’aller plus au nord, en Belgique et en Hollande ou à la recherche de la lumière du sud à Juan-les-Pins et à Venise.

Fête dans le bassin d’Honfleur, 1862 © Collection Yann Guyonvarc’h / Ph.: D.R.

Venise, le Campanile, le Palais Ducal, 1895 © Collection de Yann Guyonvarc’h / Ph.: D.R.

En raison de ses moyens financiers réduits, il n’a jamais eu d’atelier à lui, tant à Paris que sur la côte normande. À Paris, il louait son atelier (ses ateliers plus exactement, il changea plusieurs fois d’adresse) et sur la côte, il se contentait d’une simple chambre. Il lui faudra attendre 1890, pour que son port d’attache devienne Deauville où il se fait construire une maison sur un terrain dans les dunes « au prix le plus doux », profitant que la station balnéaire est passée de mode.

Exposé jusqu’en Amérique

En 1874, sur l’invitation de Monet, il est de la première exposition des impressionnistes chez Nadar, un salon parallèle pour ces novateurs, refusés par le jury du Salon officiel. Ce sera sa seule participation aux futurs salons des impressionnistes car, s’il est fier d’avoir été le maître de Monet, Boudin se défie de ce courant auquel il reproche d’avoir permis le développement d’une « peinture négligente ».
Il ne délaisse pas pour autant le Salon Officiel. Un salon dans lequel il expose, dès 1859, son Pardon de Sainte-Anne-la-Palud. Il restera, toute sa vie, fidèle à cet événement autant artistique que mondain. Comme beaucoup d’artistes alors, il mettra un certain temps à vivre de son art malgré les conseils de Monet (« Venez, je serai heureux de vous donner des conseils pour vos travaux » lui écrira le père des Nymphéas ). Il lui faudra attendre 1881 (il a alors 57 ans) pour que le grand marchand des impressionnistes, Durand-Ruel, visitant son atelier, se fait réserver toute sa production. Dès lors, son marchand multipliera les expositions. On le verra à Boston en 1890 et à New York en 1898, l’année de sa disparition. Depuis, expositions et hommages feront du gentil père Boudin, l’un des peintres les plus appréciés… Même s’il n’a pas l’aura ni la réputation de ses contemporains impressionnistes, Monet en tête.

__________________

* Cité par Isolde Pludermacher, Lettres à Ferdinand Martin (1861-1870), Honfleur, Société des amis d’Eugène Boudin, 2011 Lettre à Ferdinand Martin, 20 octobre 1872
** Charles Baudelaire. Curiosités Esthétiques (Salon de 1859)
*** Cité par Sophie Monneret dans L’Impressionnisme et son époque. Éd. Denoël,  1978

Musée Marmottan, 2 rue Louis Boilly (16e).
À voir jusqu’au 31 août 2025
Ouvert du mardi au dimanche de 10h à 18h.Dernière entrée : 17h30
Nocturne le jeudi jusqu’à 21 h.
Accès :
Métro : Ligne 9, arrêt : La Muette ou Ranelagh
RER : Ligne C, arrêt : Boulainvilliers
Bus : Ligne 22 (La Muette – Boulainvilliers), ligne 32 (Louis Boilly ou Ranelagh), ligne 52 (La Muette – Boulainvilliers), ligne 63 (Porte de La Muette), ligne 70 (Louis-Boilly) et ligne P.C. 1 (Ernest Hébert ou Porte de Passy)
Site de l’exposition : ici

Catalogue
Eugène Boudin. Le père de l’impressionnisme.
Une collection particulière.
Coédition Musée Marmottan-Monet, Paris / In Fine éditions d’art
Sous la direction de Laurent Manœuvre
248 pages. 230 ill. 32 €

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