En nous exposant le trop peu connu Jean-Francis Auburtin, le musée des Impressionnismes de Giverny, nous propose d’aller à la rencontre d’un artiste vouant au grand Monet, une très compréhensible admiration. Mettant ses pas dans ceux du grand impressionniste, Auburtin nous livre une oeuvre à découvrir d’évidence.
Posté le 31 mars ➡ À voir jusqu’au 14 juillet 2019
Jean-Francis Auburtin, La Plage à Pourville, après 1904 © MuMa Le Havre / Charles Malsard
Claude Monet, Au cap d Antibes, 1888 © Ehime, musée départemental des Beaux-Arts

Jean-Francis Auburtin, Cap des Mèdes (Porquerolles) 1896 © Coll. part. Ph.: F. Doury

Claude Monet, Les Rochers de Belle-Île, la Côte sauvage, 1886 © RMN-Grand Palis (Musée d'Orsay) / H. Lewandowski

Jean-Francis Auburtin, Les Sorcières, aiguilles de Port-Coton, vers 1895 - 1896 © Coll. part. / Ph.: F. Doury

Claude Monet, L'Aiguille et la falaise d'Aval, 1885 © Williamstown, Sterling and Francine Clark Art Intitute

Jean-Francis Auburtin, L’Aiguille d’Étretat, ciel rouge © Coll. part. Ph.: F. Doury

L’intérêt premier des musées de province est de nous présenter des artistes soit régionaux, soit éloignés des lumières des grands musées et qui, la plupart du temps, sont de belles découvertes. Pour preuve, en ce moment, la présentation des œuvres de René Laubiès à voir au musée de l’Abbaye Sainte-Croix aux Sables-d’Olonne et ici, à Giverny dans cette pimpante commune de l’Eure qui vit au rythme de la maison de Claude Monet, de la confrontation du maître à un certain Jean-Francis Auburtin (1866-1930) qui n’a pas à rougir de cette proximité avec le peintre des nymphéas. Bien que de 26 ans son cadet, Auburtin va marcher dans les pas de son aîné, fréquenter les mêmes lieux, peindre sur les mêmes motifs, se révélant tous les deux normands par choix. Monet s’installant à Giverny en 1883 et Auburtin à Varengeville en 1907, non sans avoir, comme son aîné, fréquenté la Côte d’Azur dont il a ramené naturellement quelques œuvres.
Mais pourquoi est-il resté dans l’ombre ? Déjà parce que bien qu’entouré dans sa sphère familiale par quelques personnalités de renom, il ne se destinait pas à devenir peintre mais fut très vite un décorateur reconnu. Une activité qu’il exerce pour des bâtiments publics et les appartements de riches bourgeois. Mais de la peinture décorative à la peinture de paysages il y a qu’un pas, qu’il franchit allégrement lors de voyages alors qu’en cette fin du XIXe siècle, les villégiatures et autres attraits pour les excursions se développent. Auburtin fréquente surtout la Côte d’Azur, que Monet avait arpenté avant lui. Pour Auburtin, la découverte de Porquerolles, puis de Cannes, Grasse et Mougins, deviennent des motifs qu’il brosse, avec toujours en rappel les leçons du grand Monet. Puis, sur les pas du grand impressionniste on le voit aussi à Belle-Île se mesurer à une mer qui se déchaîne sur la dentelle des rochers granitiques, avant de trouver dans la Normandie, un havre de paix.
Le havre normand
Jean-Francis Auburtin, Madame Auburtin au bord de la mer, vers 1895 © Coll. part. / Ph.: F. Doury
Étretat, Pourville et surtout Varengeville, devenu un phalanstère d’artistes, seront les ultimes étapes de ses déambulations. Les falaises, la petite cabane des douaniers qui surplombe le grande falaise de craie sont leurs sujets favoris et là encore Auburtin met ses pas dans ceux de son maître. Il sillonne sans relâche ces sentiers escarpés, chemins de contrebande comme de douane, s’arrête pour planter son chevalet face à la petite église de Varengeville, presque un décor de carte postale tant tout y est arrangé pour le plus grand bonheur des peintres et des touristes. Au cours de ses pérégrinations, le décorateur va céder le pas sur le peintre reconnu, qui expose dans de nombreux salons et dans quelques sociétés de beaux-arts.
Mais alors pourquoi ce purgatoire ? Il est vrai ici que le considérer comme un bon peintre qu’il fut ne tient, naturellement, pas le regard face au grand Monet. Ne serait-ce que l’on est bien obligé de considérer Auburtin comme un suiveur qui, pourtant, avec les 26 années de décalage sur son aîné apporte toutefois une belle touche de modernisme à un Impressionnisme qui alors – nous sommes dans les premières années du siècle – était passé d’avant-garde à presque classique. Auburtin, lui, en homme de son temps mêle à ses accents impressionnistes des touches de synthétisme d’un Sérusier ou d’un Puvis de Chavannes. Auburtin serait donc, à sa juste mesure, comme un trait d’union ? En tous les cas, chemin faisant, il a réussi surtout à être lui-même et à développer enfin un art qui lui est personnel. A découvrir donc ce peintre resté confidentiel, d’autant que Giverny est charmant et le musée a un beau jardin et un agréable petit restaurant.
Musée des Impressionnismes, 99, rue Claude Monet, Giverny (27)
Ouvert tous les jours de 10h à 18h
Site de l’exposition : www.mdig.fr/fr/