Une pierre de plus apportée au monument Picasso : celle de l’importance et des conséquences qu’eurent sur lui les trois conflits qu’il traversa. Les deux Guerres mondiales et surtout celle qui l’a sûrement le plus touché au cœur : le Guerre d’Espagne. Avec force documents, œuvres, photos et objets cette exposition au Musée de l’Armée est à suivre avec l’important guide qu’est son catalogue, indispensable complément pour mieux appréhender cette nouvelle facette de la vie de ce démiurge du XXe siècle.
Posté le 11 juin ➡ À voir jusqu’au 28 juillet 2019
Pablo Picasso, Massacre en Corée, Vallauris, 18 janvier 1951 © RMN-Grand Palais (Musée national Picasso-Paris) / Mathieu Rabeau / Succession Picasso 2019
Pablo Picasso, lettre à Guillaume Apollinaire,, 31 décembre 1914 © RMN-Grand Palais (Musée national Picasso-Paris) / Thierry Le Mage / Succession Picasso 2019

Pablo Picasso, dessin préparatoire pour « Guernica », Paris, 1er mai 1937 © Archivo Fotografico Museo Nacional Centro de Arte Reina Sofía, Madrid / Succession Picasso 2019

Pablo Picasso, Coq tricolore à la croix de Lorraine, Paris, Printemps 1945 © RMN-Grand Palais (Musée national Picasso- Paris) / Succession Picasso 2019

Pablo Picasso, Crâne, oursins et lampe sur une table, Antibes, Paris, 27 novembre 1946 © RMN-Grand Palais (Musée national Picasso-Paris) / Adrien Didierjean / Succession Picasso 2019

Pablo Picasso, L’Enlèvement des Sabines, Mougins, 4-8 novembre 1962, Paris, © Centre Pompidou, MNAM-CCI, Dist. RMNGrand Palais / Ch. Bahier & Ph. Migeat / Succession Picasso 2019

Pablo Picasso, La Guerre, 5 octobre 1951 © RMN-Grand Palais (Musée national Picasso-Paris) / Succession Picasso 2019

Oui, Picasso encore, Picasso toujours ! S’en lasse-t-on ? Un ouvrage d’importance qui est le catalogue d’une exposition inédite aux Invalides, exposition qui replace l’homme et l’œuvre dans les années pendant lesquelles les guerres ont traversé sa vie. Il en connu trois. Deux dans son espace proche, les Première et Seconde Guerre mondiale. N’oublions pas qu’il fut résident en France dès 1901. Et une qui le toucha surement plus au cœur bien qu’il fut éloigné du théâtre de ce conflit, c’est naturellement la guerre d’Espagne dont il tira le poignant chef d’œuvre qu’est Guernica. Une exposition faite essentiellement de documents (lettres, coupures de presse, dessins, photos et objets) et de quelques œuvres desquelles il manque naturellement Guernica, pourtant manquant dans la série iconique des photos de Dora Maar exposées en ce moment à Beaubourg, mais qui fit l’objet d’une belle exposition au Musée Picasso dernièrement. Mais tout aussi étonnant : pas une évocation de Le Charnier (conservé au MoMA de NY), tableau peint juste après-guerre, rare œuvre évoquant directement le deuxième conflit mondial.
Cela étant dit, ce genre d’exposition révèle alors souvent que c’est le catalogue, au centre du sujet, qui devient la véritable pierre angulaire de l’exposition, tant les textes de ses contributeurs éclairent parfaitement le propos de l’exposition. Elle-même devenant comme les « illustrations » en « taille réelle » des textes. Divisé en deux parties (Créer en temps de guerre et Créer contre la guerre), l’ouvrage explore ce que le thème lié aux temps traversés a laissé comme empreinte dans l’œuvre et nous démontre que si le peintre ne fut jamais un homme de guerre, il fut, en revanche, un fervent militant pour la paix.
Trois guerres ont ponctué sa vie
Picasso, qui n’a jamais activement participé à une guerre a, de par ses prises de position, sa notoriété et son adhésion au Parti communiste français, fait beaucoup pour le « parti de la Paix ». Il se revendiquait de ce parti des « 75000 fusillés » – avec raison – pour bien ancrer dans l’opinion la part active d’une lutte de pouvoir médiatique et politique face à l’autre bloc, celui des « libérateurs » venus de Londres… Et peut-être aussi afin effacer la tâche de ce pacte germano-soviétique des premières années pour un parti alors complètement aligné sur Moscou ?
Ce deuxième conflit mondial qu’il a vécu dans le Paris occupé va être sûrement pour lui le déclencheur d’une prise de conscience politique. La paix revenue, il la magnifie dans des œuvres comme Le Triomphe de Pan, une bacchanale adaptée de Poussin. Et s’il n’est pas un peintre d’histoire au sens normalement admis, il n’en dénoncera pas moins certains des conflits suivants comme dans ce Massacre en Corée, toile d’importance qu’il brosse en 1951, adapté d’évidence de L’Exécution de Maximilien de Manet.
Mais c’est surtout du côté de l’évocation de la paix qu’on le
Pablo Picasso, Lettre à André Salmon, Paris 6 mai 1915 © Musée national Picasso de Paris / Succession Picasso / Ph.: D.R.
retrouve au mieux avec, pour exemple, les peintures à fresque de la chapelle De la guerre et de la paix de Vallauris et naturellement, cette « envolée » de colombes, oiseau dont il fait à jamais, dans l’iconographie populaire, le symbole de la paix. Avec ces nombreux contributeurs, cet ouvrage aborde tous les aspects de cette thématique dans l’œuvre, mais aussi et surtout, de la vie de Picasso qui avait été rarement abordé, replaçant l’homme dans son époque et dans ses engagements.
PICASSO ET LA GUERRE
Exposition : Musée de l’Armée, Hôtel national des Invalides
129, rue de Grenelle (7e)
à voir jusqu’au 28 juillet 2019
Ouvert du lundi au vendredi de 10h à 18h. Nocturne le mardi jusqu’à 21h.Samedi et dimanche de 10h à 19h.
Site du musée : www.musee-armee.fr
Catalogue : co-édition Gallimard / Musée de l’Armée. 352 p. 450 ill. 35 €