Le Musée de l’Armée nous présente une étonnante exposition sur les canons de l’élégance des soldats. Uniformes rutilants, bien coupés et décorés, armements d’or et d’argent, armures damasquinées et autres décorations ont, au long des siècles conférés aux soldats comme aux officiers un statut social reconnaissable de suite leur donnant une part de l’autorité qu’ils servent.
Posté le 26 décembre 2019
Exposition à visiter jusqu’au 26 janvier 2020
Photo in situ de l’exposition Les Canons de l’élégance © Paris, musée de l’Armée /Anne-Sylvaine Marre-Noël
Habit de tambour des Coldstream Guards, vers 1890 © Paris, musée de l'Armée / Dist. RMN-Grand Palais / Anne-Sylvaine Marre-Noël

Détail de l’uniforme de brigadier, escadron des Cent-gardesFrance, Second Empire (1852-1870) © Musée des Armées, Paris

Carabine à silex, récompense pour le second prix de la course de chars, vers 1799-1800 © Paris - Musée de l'Armée, Dist. RMN-Grand Palais / Émilie Cambier

Coffret de pistolets à percussion offert par Napoléon III au général Lebrun, son aide de camp. France, avant 1862 © Musée des Armées, Paris

Crosses de deux pistolets à silex, vers 1660 © Paris, musée de l'Armée / Dist. RMN-Grand Palais / Anne-Sylvaine Marre-Noël

Fusil d’assaut HK G3 offert par le royaume d’Arabie Saoudite à Charles Hernu, ministre de la Défense Arabie Saoudite, vers 1981-1983 © Musée des Armées, Paris

Se faire beau pour aller à la guerre ! Développer le meilleur des artisanats pour se parer devant l’ennemi ou asseoir sa position sociale à coups de rutilances, d’effets moirés, d’uniformes chamarrés sur lesquels sont posés des décorations dues à de grands orfèvres, sans oublier les armes – glaives, sabres, épées, pistolets, fusils – faits de bois précieux, d’argent et même d’or, sculptées, gravées, et autres casques orgueilleux, shakos brodés, casquettes galonnées d’or… Tel est le sujet de cette étonnante, autant que curieuse exposition présentée là où elle est le plus à sa place : le musée des Armées sis dans l’Hôtel des Invalides construit (à la campagne à l’époque !) par Louis XIV pour abriter ses vieux soldats.
On se souvient tous de nos piou-pious de 14 qui abhorraient encore le pantalon rouge garance qui, s’il avait un certain chic, servait surtout à l’ennemi à les repérer ! Il fut très vite, dès 1916, remplacé par le « bleu horizon » qui se fondait plus facilement dans le paysage et laissa ensuite sa place au vert kaki et autres tenues camouflées de nos jours.
Pourtant, pendant des siècles, à la guerre il fallait parader, porter beau, être voyant, presque dandy ! Jean Lannes, maréchal de l’Empire ne tenait-il pas à ce que « tous les officiers paraissent, sur le champ de bataille, aux yeux du soldat, comme s’ils étaient à la noce » ! Ce moyen de distinguer le soldat, l’officier du reste de la population avait pour effet d’en faire une caste à part, attirant par la beauté de leur tenue respect, envie et convoitise. L’uniforme alors pouvait aussi être une vitrine pour l’engagement, la promesse d’être bien traité et de faire partie d’une élite. Et le général Thierry Burkhard de rappeler cette maxime encore usitée dans l’armée de terre qui veut « qu’un beau soldat est la moitié d’un bon soldat » !
Le soldat, une icône sociétale
L’exposition ne se cantonne pas seulement aux uniformes – le musée en regorge par ailleurs et de toutes les époques – ces pièces d’habillement resplendissantes faites, pour les officiers dans les plus beaux tissus, les plus belles peaux et ornées de fils d’or et de broderies méticuleuses. Mais cette élégance dépasse le vêtement et se retrouve dans tout l’équipement faisant de celui qui les porte une sorte d’icône sociétale qui impose le respect comme l’envie et assoit son pouvoir et celui
Heaume de l’armure du dauphin, futur Henri II, entre 1536 et 1547 © Paris – Musée de l’Armée / Dist. RMN-Grand Palais / Émilie Cambier
de l’État qui le lui délègue.
Ces attributs permettent alors à celui qui en est paré d’afficher aux yeux de tous la dignité et la confiance que l’on porte en lui. Une réflexion qui renvoie au regard énamouré d’une Brigitte Bardot regardant défiler sous ses fenêtres le beau lieutenant Gérard Philipe dans Les Grandes manœuvres de René Clair. Aujourd’hui les choses ont bien changé et pourtant le soldat en treillis, gilet pare-balle et armement sophistiqué renvoie toujours une même image colportée par le cinéma d’action et les jeux-vidéos qui subliment toujours ce héros intemporel de toutes les sociétés.
Une kalashnikov… dorée !
L’exposition nous présente naturellement des uniformes mais aussi des protections (cuirasse et armures) et des armes dont certaines sont de véritables chefs d’œuvre d’orfèvrerie à l’image de cette armure en fer damasquiné d’argent, datant du milieu du XVIe siècle, ayant appartenue au futur dauphin Henri II. Ou encore cette épée de diamant de Louis XVI ou cette autre d’honneur en cristal offerte au maréchal Pétain, sans oublier les cadeaux entre grands du monde, les coffrets de pistolets comme ceux d’ébène et d’argent offert par Napoléon III à son aide de camp ou ce fusil et ce pistolet de bois précieux et d’or pour le chérif du Maroc, don de Napoléon Ier. Et enfin, plus étonnant cette kalachnikov en acier doré offerte au ministre de la Défense de François Mitterrand, Charles Hernu, par le roi d’Arabie Saoudite !
Musée de l’Armée, Esplanade des Invalides, 129 rue de Grenelle (7e)
À voir jusqu’au 26 janvier
Tous les jours de 10h à 17h.
Accès :
Métro : Ligne 8 stations La Tour Maubourg ou Invalides. Ligne 13 : Varennes
RER C : station Invalides
Bus lignes 28, 69, 82, 92, 63, 83 ou 93
Site du musée : www.musee-armee.fr/
Catalogue :
Les Canons de l’élégance
Editions Faton / Musée de l’Armée. 384 p. 380 ill. 49 €