Posté le 1er juin 2021
Alors que certains hauts lieux de la culture sont fermés comme le Grand Palais depuis le début de cette année ou le Centre Pompidou qui le sera de 2023 à 2027 pour travaux, d’autres rouvrent après un réaménagement, ou une rénovation, ayant en partie « profité » de leur fermeture pour cause de pandémie. C’est le cas de six lieux emblématiques ou nouveaux du parcours culturel parisien. Dans le Marais pas moins de trois adresses : Le Musée de la Chasse et de la Nature, la Maison de Victor Hugo et le Musée Carnavalet. Entre Beaubourg et le Louvre : la Bourse du Commerce réaménagée pour accueillir la collection de François Pinault (voir notre article). À l’ouest le Palais Galliera, musée consacré à la mode, et enfin, Place de la Concorde, le très attendu Hôtel de la Marine, rendu au public après que le Ministère de la Marine, qui l’occupait, est allé rejoindre ce « Pentagone » à la française installé Porte de Versailles. Plus que jamais notre capitale présente une belle offre culturelle
HOTEL DE LA MARINE
Ca y est ! Vidé du Ministère de la Marine qui occupait ce magnifique bâtiment donnant sur la Place de la Concorde, le bâtiment est enfin rendu au public, puisque ce dernier n’a jamais pu y pénétrer depuis sa construction. Restauré et remeublé, il nous offre aujourd’hui une vision du goût à la française des XVIIIe et XIXe siècle. Monument historique, ce majestueux bâtiment à la façade arborant une admirable colonnade, fut dès 1663 le garde-meuble de la Couronne. Pillé lors de la Révolution, il retrouva cette fonction sous l’Empire et le resta jusqu’à son déménagement en 1937. Une partie du bâtiment toutefois fut délégué dès
Place de la Concorde, Hotel de la Marine vu depuis la fontaine des Fleuves © CMN / Ph.: Jean-Pierre Delagarde
1789 pour que s’y installe le Ministère de la Marine, qui l’occupa ensuite entièrement jusqu’en 2015, année de son déménagement pour rejoindre le « Pentagone » à la française de la Porte de Versailles. Un si beau bâtiment attisa beaucoup de convoitise et il ne pouvait rester vide. Il fut envisagé un temps d’y installer un Musée de l’Histoire de France puis quelques autres projets, dont un « Centre Mondial de la Création et de la Culture » projet qui en cédait l’exploitation à un entrepreneur privé. Ce qui avait suscité de nombreuses réserves du fait du caractère essentiellement commercial de cette offre.
Pour couper court à toutes spéculations, le Centre des monuments nationaux a pris les choses en main pour, dans un premier temps, redonner tout son lustre d’antan au bâtiment. À charge pour la CMN d’en développer des activités qui mettront en valeur aussi bien, selon le cahier des charges, le patrimoine exceptionnel que représentent l’architecture de Gabriel (ndlr son architecte à qui on doit aussi son pendant de l’autre côté de la rue Royale et qui abrite l’Hôtel de Crillon), les décors et objets d’art des XVIIIe et XIXe siècles ainsi qu’un certain nombre de thèmes associés depuis toujours au rayonnement de la France, comme les arts décoratifs, les arts de la table ou l’art de recevoir.
La restauration, pour un budget de 130 millions d’euros, a porté sur la totalité du monument, des façades et toitures, des menuiseries, sculptures, maçonnerie et la suppression de tous les ajouts modernes ce qui a permis de retrouver le bâtiment dans sa configuration d’origine. Puis est intervenu le temps du « réenmeublement » pour redonner aux pièces et salons leur cachet d’autrefois. Pour se faire, il a été procédé à un rigoureux travail d’identification, de recherche et de localisation des meubles et objets d’origine. Grâce à la généreuse collaboration d’importants partenaires publics, comme le Mobilier national, le musée du Louvre, celui des Arts Décoratifs et du château de Versailles, ainsi que le ministère des Armées et la Manufacture de Sèvres, tous ont permis que de nombreux dépôts soient réalisés. Rendu au public qui n’avait pu y pénétrer depuis sa construction, la visite permet pour l’instant, de voir les lieux qui ont retrouvés tout leur éclat.
Une déambulation didactique aussi avec une scénographie qui déroule les différents événements dont ces murs ont été les témoins. En attendant, pour cet automne, une première exposition consacrée aux trésors de la Al Thani Collection, l’une des collections privées parmi les plus prestigieuses au monde. Une collection qui comprend un éventail exceptionnel d’œuvres d’art couvrant une longue période de l’Antiquité à nos jours, et représentant la riche diversité des cultures et des civilisations à travers les âges. Et naturellement des espaces de restauration avec un café et un restaurant complètent l’offre…
Hôtel de la Marine
2 place de la Concorde Paris 8e
Ouvert tous les jours de 10 h 30 à 19 h
La cour intérieure est ouverte de 9 h à minuit.
Nocturnes chaque vendredi jusqu’à 22 h
Site de l’hôtel : ici
Rue des Francs-Bourgeois, musée Carnavalet – Histoire de Paris, Cour des Drapiers © Cyrille Weiner
MUSÉE CARNAVALET
Dans cet hôtel, que l’on doit en partie à l’architecte François Mansart sur la base d’un premier hôtel construit au milieu du XVIe siècle, et situé en plein Marais, est installé, depuis 1880, le musée Carnavalet, auquel est adjoint depuis longtemps un autre hôtel attenant, Le Peletier de Saint-Fargeau. Le tout formant ce musée consacré à l’histoire de Paris. Il semblait avoir, depuis, conservé son goût très XIXe dans un décor qui sied parfaitement à sa thématique.
Presque cinq années de travaux, et un budget de plus de 40 millions d’euros, ont été nécessaire pour une refonte totale qui a consisté notamment à
restaurer ses façades, ses baies, ses cours et certains parquets, à redéfinir le parcours de visite et à l’adapter au 21e siècle avec mise aux normes, création de circulations verticales et de nouveaux espaces. Sur 4000m2 sont présentés 3 800 objets (sur une collection riche de 625 000 œuvres), des peintures, meubles, sculptures, maquettes, documents et autres objets d’art, dont la plupart ont été restaurés. L’ensemble couvrant plus d’une quinzaine de siècles de l’histoire de la capitale, du Lutèce des parisis aux derniers bouleversements de la ville. Et enfin, cédant à la vogue actuelle, un café-restaurant donnant sur les 2000m2 de jardin a été aménagé.
En espérant que ce « lifting » total n’aura pas complètement gommé cet aspect un peu désuet de musée de province qui faisait tout son charme. Ces enfilades de pièces qui respiraient encore leur destination première, cette impression de pénétrer dans l’intimité de la charmante épistolaire, Madame de Sévigné, qui habita les lieux de 1677 à 1696 avec ses salles qui avaient conservées leur décor XVIIe et XVIIIe siècle. Cette remarque dite, il est vrai que ses richesses étaient jusqu’alors présentées dans un charmant et un brin désuet désordre. Charmant, peut-être mais cette confusion se prêtait souvent mal à une véritable approche muséale et didactique. Mais rassurons-nous, la chambre reconstituée de Proust ou ses célèbres chambres à décors seront toujours de la visite. Pour cette réouverture, le musée nous propose, en plus de ses collections permanentes, un accrochage de photos de Cartier Bresson (à partir du 15 juin 2021 et à voir jusqu’au 31 octobre 2021). Le photographe est décidément très en cour puisque la BNF Mitterrand nous accroche aussi en ce moment plus de 300 de ses photos ! Pour cette exposition ici, il s’agira, on s’en doute, de mettre en lumière l’importance de Paris dans l’œuvre du grand photographe. Exposition un brin « bateau » et facile, on aurait pu s’attendre à plus d’effort, comme de nous faire découvrir un photographe « parisien » moins connu, pour souligner cette réouverture par ailleurs très attendue. Reste à découvrir tout le musée et ses trésors, et c’est déjà beaucoup !
Musée Carnavalet
23 rue de Sévigné Paris 3e
Le musée est ouvert du mardi au dimanche de 10h à 18h
Site du musée : ici
MAISON DE VICTOR HUGO
À quelques centaines de mètres des musées de la Chasse et de Carnavalet, sur cette magnifique Place des Vosges, est sise la maison que l’auteur des Misérables occupa de 1832 à 1848. Le lieu nous a habitué à de très belles expositions autour de l’œuvre « hydresque » du grand écrivain. Après la rénovation de sa maison de Guernesey, c’est donc au tour de son domicile parisien, fermé depuis avril 2019 et qui devait rouvrir il y a un an, mais, la pandémie passant par là, ne rouvre que maintenant. Les lieux, un brin exiguës – n’oublions pas qu’il s’agit d’un appartement sur plusieurs niveaux – présentaient une déambulation et un
Place des Vosges, Maison de Victor Hugo © Paris Musées / Ph.: D.R.
sens de circulation parfois peu commode obligeant le visiteur à revenir sur ses pas afin de ressortir par l’entrée.
Maintenant, les visiteurs pourront désormais repartir par un escalier de service en fin de visite, celui-là même qu’empruntait l’écrivain lorsqu’il voulait sortir de chez lui en catimini, escalier redécoré de manière à rester en accord avec le décor du reste de la maison. Cet escalier débouche sur une cour intérieure, réaménagée et décorée d’une copie de La Fontaine aux serpents dont l’original décore le jardin de Hauteville House, sa maison d’exil à Guernesey. Dans cette cour on trouvera, comme c’est souvent le cas maintenant dans tous les lieux de culture, un café confié à la maison Mulot, le pâtissier bien connu de la rive gauche.
Cette réouverture se fera avec une exposition de la collection de dessins d’Hugo, dont on sait qu’il fut un excellent dessinateur et cet accrochage permettra d’appréhender cette facette importante de son génie. De ses premiers dessins faits sous l’égide de son ami Célestin Nanteuil peintre et graveur, du Cercle des romantiques, jusqu’au dernier cycle celui du Poème de la Sorcière. Son œuvre graphique, souvent monochrome et teinté d’un romantisme sombre est à lire à l’aune de son œuvre écrit et de ses valeurs humanistes.
Maison de Victor Hugo
6 place des Vosges Paris 4e
Ouvert du mardi au dimanche de 10h à 17h40
Site de la maison : ici
Avenue Pierre Ier de Serbie, le Palais Galliera © Paris Musées / Ph.: D.R.
PALAIS GALLIERA
Ce musée consacré à la mode s’est, lui aussi, refait une beauté après deux années de grands travaux de rénovation et d’extension, se dotant de nouvelles galeries qui accueilleront le premier parcours permanent dédié à l’histoire de la mode à Paris. Il complète ainsi le vœu de son créateur, un certain Maurice Leloir qui fit don de sa collection à la Ville de Paris en 1920. Situés au rez-de-jardin et pourvus d’une superficie de plus de 700m2, ces nouveaux espaces, baptisés Galeries Gabrielle Chanel, permettent de présenter une histoire de la mode du XVIIIe siècle à nos jours à travers les collections du musée.
Les raccrochages réguliers, nécessaires à la bonne conservation des pièces est possible grâce à la formidable richesse de son fonds. Cela permettra aussi de varier les angles et les thématiques de ce parcours permanent. Ces nouvelles galeries permettront en outre de développer des expositions temporaires comme celle présentée actuellement qui nous offre la première rétrospective du travail de la grande Gabrielle « Coco » Chanel. Un parcours jalonné par plus de 350 pièces issues des collections du musée et de musées internationaux, auxquelles viennent s’adjoindre bijoux et artefacts. Exposition à voir jusqu’au 18 juillet 2021.
Palais Galliera
10 av. Pierre Ier de Serbie, Paris 16e
Ouvert du mardi au dimanche de 10h . 18h
Nocturnes : le jeudi et le vendredi jusqu’à 21h pendant l’exposition Gabrielle Chanel. Fermé les lundis.
Site du palais : ici
MUSÉE DE LA CHASSE
ET DE LA NATURE
Installé dans l’hôtel Guénégaud (XVIIe siècle) depuis 1967, le musée a grignoté l’hôtel de Mongelas voisin en 2007 pour s’agrandir. Il était fermé depuis juillet 2019 pour des travaux d’agrandissement de sa surface d’exposition. Cette dernière s’est vue octroyer un étage de plus composé de six nouvelles salles traversant les deux hôtels Guénégaud et Mongelas. 250m2 supplémentaires qui permettront de déployer de nouvelles pièces de la collection dans un nouvel accrochage et de créer de nouveaux espaces pour les expositions temporaires. Ce musée
Rue des Archives, Musée de la Chasse et de la Nature © Fondation François Sommer / Ph.: D.R.
privé a suivi l’évolution de la société et des esprits en ce qui concerne le regard que l’on a de nos jours sur la chasse. Sans complètement changer son fusil d’épaule, le musée s’est, avec bonheur, ouvert sur la nature – accolant même ce vocable à son intitulé – et les écosystèmes dans une optique très naturaliste. Le musée est fort d’une belle collection d’œuvres anciennes comme modernes et contemporaines comprenant nombre d’animaux naturalisés, d’armes, de mobilier et naturellement de dessins, tableaux et estampes. À la faveur de cette rénovation et de cette extension, le musée « expose » le rapport de l’homme à l’animal à travers les âges, de l’Antiquité à nos jours.
Pour sa réouverture, le musée offre ses nouveaux espaces au peintre et plasticien Damien Deroubaix pour une exposition titrée La Valise d’Orphée. Entre magie et sacré, il nous entraîne dans une grotte primitive réalisée par lʼartiste, où sont alignées 300 figurines zoomorphiques modelées en différents matériaux (bronze, céramique…) et souvent vieilles de plusieurs milliers dʼannées. Recueilli autour du bassin méditerranéen et collectionné par Naji Asfar, cet ensemble lilliputien tient dans le volume dʼune valise. Dénonçant la cruauté des humains qui menacent la vie animale, végétale et la survie de notre planète, Damien Deroubaix catapulte ces objets millénaires vers un questionnement actuel où lʼhomme et la nature se trouvent en interaction. Seront aussi accessibles toutes les salles présentant des pièces de la collection permanente.
Et enfin, le rez-de-chaussée comprend désormais un accueil plus spacieux et de nouveaux espaces dont une librairie-boutique et un café, libres d’accès.
Musée de la Chasse et de la Nature
62, rue des Archives Paris 3e
Le musée est ouvert du mardi au dimanche de 11h – 18h
Nocturnes certains mercredi : 18h – 21h30
Fermé le lundi et les jours fériés
Site du musée : ici